La veille des premiers essais d’un Grand Prix moto, dans la joyeuse agitation d’un paddock, il est plutôt improbable que le privilégié qui s’y promène risque un torticolis en croisant un chariot de pneus. Jeudi pourtant, au circuit de Portimao (Portugal), le « tyreman » de Michelin aurait pu donner du travail à bien des kinés de ce coin d’Algarve. La faute à ce qu’il tractait derrière lui : un pneu à l’esthétisme en totale rupture avec ce qu’on peut voir traditionnellement sur un deux-roues, à savoir une bande de roulement en forme de toile d’araignée, tout en contraste entre noir et gris, et avec une sensation de velours au toucher.
« C’est vrai qu’on a l’habitude de voir un pneu noir, rond, lisse. Là, ça crée un effet de surprise et ça intrigue »
« C’est vrai qu’on a l’habitude de voir un pneu noir, rond, lisse. Là, ça crée un effet de surprise et ça intrigue », glisse le responsable de l’activité moto chez Michelin Motorsport, Piero Taramasso, pas peu fier de l’effet visuel suscité par le « Race to vision », le nom de ce nouveau pneu slick, uniquement arrière et dédié au championnat du monde MotoE. Cette série monotype (des Ducati de 160 ch) consacrée aux motos électriques, entame justement ce samedi en Algarve, sa sixième saison au calendrier de la Fédération internationale. La manufacture clermontoise en a donc profité pour présenter en grande pompe - ou en grandes jantes c’est selon - sur le circuit portugais, le dernier né de ses recherches.
Des recherches tout sauf neutres tant la mobilité électrique des deux roues est un marché en pleine expansion dans le monde. « C’est l’avenir, incontestablement. Et la compétition constitue, comme toujours pour nous, le laboratoire idéal pour tester nos technologies avant de les appliquer dans les modèles de série. Le design original nous permet de marquer le coup et de rendre visible quelque chose qui n’est pas visible », continue Piero Taramasso.
Car au-delà de l’aspect visuel, qui plus est éphémère car les motifs sont voués à s’effacer après seulement quelques tours de piste avec l’usure de la gomme, c’est surtout sur le plan technologique que Michelin a… mis la gomme. La grande évolution réside dans le fait que le pneu intègre un pourcentage augmenté et plus que symbolique de matériaux renouvelables (écorces d’oranges ou de citrons, résine de sapins…) et recyclés (pneus usagers de voitures ou d’utilitaires légers, acier, …) : 49 % à l’avant, 53 % à l’arrière très exactement. « On progresse chaque fois un peu plus sur ce pourcentage mais notre objectif c’est qu’on soit à 100 % pour l’ensemble de nos pneus », assure Piero Taramasso.
Moto : Michelin devient sponsor titre du Grand Prix de France
Au milieu du programme traditionnel d’un week-end de Grand Prix, la MotoE peine encore à sortir du lot avec son plateau de 18 pilotes, principalement italiens et sans noms ronflants, et ce malgré des performances intéressantes (les MotoE roulent plus vite que les Moto 3) et des courses spectaculaires et nerveuses en piste. Dès demain, elle pourra toutefois compter sur Michelin pour créer l’événement avec son pneu arrière original. « Ça va attirer l’œil des gens et les faire réaliser qu’on peut faire fabriquer des pneus rapides et respectueux de l’environnement. En cela, c’est parfaitement conforme à notre philosophie », souligne d’ailleurs Nicolas Goubert, le directeur exécutif de la Dorna, organisateur des Grands Prix, qui mesure bien le travail réalisé, lui qui a longtemps œuvré chez Michelin Motorsport…
Frédéric Verna
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